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« Des écritures en Patchwork »
Textes de Marcel
ALOCCO parus de 1965 à 1985
en divers périodiques ou catalogues
Publiés en recueil par les « Z’Editons » d’Alain
Amiel, à Nice en 1987
35.
Pourtant tout semblait d’une limpide simplicité
A propos du Centre de Documentation des Artistes de la Région.
C.N.A.C Nice
Mettre en place un nouvel outil de connaissance est toujours un pari.
D’autant que des têtes, en multitude, ne parviennent guère à dépasser
l’opinion que ce qui n’existe pas ne devra pas avoir droit
d’existence.... Michel Butor et Henri maccheroni (ced dernier coupable
en plus de l’avoir proposé dèys le projet initial
du CNAQC° qui, avec l’aide du Conseil d’Orientation et
au sein di CNAC-Villa Arson ont élaboré les modalités
du « Centre de Documentation des Artistes de la Région »,
seraient-ils, dans la perspective institutionnelle, de grands naïfs ?
Pierre Bourdieu, s’il avait eu à évoquer le western
provincial qui menace d’agiter une part au moins de la meute artistique
locale, aurait probablement avancé la confusion ici, au yeux
de ces artistes, de l’instrument et des enjeux, et renouvelé aux
responsables la mise en garde : « Karl Kraus (...)
disait bien dans son éditorial du premier numéro de sa
revue DIE FACKEL, que celui qui refuse les plaisirs et les profits faciles
de la critique lointaine, pour s’attacher à l’environnement
immédiat (...) doit s’attendre aux tourments de la persécution
subjective » (Homo Academicus, Editions
de Minuit, 1984).
Pourtant tout semblait d’une limpide simplicité. Le « Centre
de Documentation des Artistes de la Région » devait
répondre aux questions : « Quels sont les artistes
qui travaillent dans notre région ? » et « Que
font-ils ». Une remarque en passant :la Région
est ici la source (et le présent), ce qui différencie le
C.D.A.R du FRAC pour lequel la Région est la mer qui alimente
une collection,laquelle ne se donne aucune limite géographique
de principe. Ici un service aux composantes variables (actualisées,
en transit) là, avec des moyens autres, un fonds avec addition
annuelle — cumulatif.
Il ne semble pas compliqué de répondre à la première
question (essayez !). Une simple liste suffit ? Mais... où commencer,
par où poursuivre, où aussi, contraint aux contingences
des frontières qui séparent les hommes des dieux et les
créateurs du Créateur, poser la limite ? Et puisque
nous nous engageons un peu indûment peut-être, dans la voie
de l’humour (en quadrichromie) osons proférer que les pauvres
bâtisseurs de dictionnaires nous comprendront. Il faudra nous résoudre à un
arbitraire, toujours provisoire, toujours révisé en extension,
toujours limité à un constat d’évidence — d’existence— qui
ne sera probablement guère évident pour ceux qui existent...
sur un autre territoire peut-être (ou un autre temps, un autre
espace... ?). Assumer aux yeux des uns qu’une lisière
toujours sépare un au-dedans d’un au-dehors, et (probablement
plus difficile encore) aux yeux des autres que certains soient dedans
aussi, contre le désir de quelques-uns de les maintenir à l’extérieur.
On rencontre là l’infantilisme de nombre d’artistes
qui toujours cherchent la faille, l’aspect négatif (on invente
quand on ne trouve pas) et n’ont de cesse de tenter de casser le
jouet, pour ensuite pleurer qu’ils s’ennuient, et qu’on
devrait bien leur offir un jouet neuf, si possible à leur exclusif
usage, évidemment. Car il y a en beaucoup d’artistes de
la coquette (mais version 19° siècle : aujourd’hui
les coquettes seraient plutôt machos !). Coquettes donc si
peu sûres de leurs (man-)oeuvres qu’elles craignent leurs
séductions confondues (les unes avec les autres). Comment distinguer
ceux qui, à les en croire, ne se peuvent discerner des autres ?
Question épistémologique face aux affirmations doxiques
des intéressés (voir, encore, Dictionnaire) ou méthodologique
même, se heurtant au têtu restreint des solutions pratiques.
(Nous sommes pour l’exigence et pour la rigueur... intellectuelle).
Cependant, nous sommes si peu dogmatiques que nous irons jusqu’à admettre,
bien que de mauvaise grâce avouons-le, que d’autres le soient !...
C’est leur affaire.
Le « que font-ils » de la deuxième question
découle directement de la première, inséparable
dans la formulation synthétique : « qui fait quoi ? ».
La liste enfin établie— (et provisoire, mais oui, mais
oui, on ne nous laissera pas l’oublier...) il n’est plus
que de faire. Faire significatif, et faire vivant. Et le vivant, ça
bouge. D’où les trois modules articulés avec possibilités
de mise à jour, et le catalogue « perpétuel » en
fiches, comme la calendrier. Par fragments successifs, et dans le temps,
souhaitons le, obstiné jusqu’à épuisement...
(des listes ou de l’instrument ?). Mise en exposition. Exposés :
qui dans leurs oeuvres, qui dans la démarche, mais dans une aventure
collective.
Donc, pour être conforme à notre volonté d’exigence
et de rigueur (intellectuelle) : l’arbitraire du constat documentaire,
cette suggestion d’objectivité que donne le « relevé panoramique ».
(Temps de pose photographique) Et assumer de faire la mesure, avec son
propre regard, pas à pas, de l’infini. Processus que rendrait,
je crois, le mot « incommensurable » (voir encore,
encore, le dictionnaire...) le pas et l’infini n’ayant pas,
semble-t-il, de sous multiple commun. On n’en peut donc prendre
la mesure. Comme si la route se créait sous les pieds : ce
que fait l’escargot, qui déroule indéfiniment la
voie devant sa progression. Exemple à suivre ? Pressons-nous
lentement, mais avançons. Et si possible, assez nombreux, ensemble.
Merci d’avoir suivi cette route avec nous jusqu’en bas de
la colonne.
Nice, décembre 1984.
Kanal n°9 , mars 1985
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